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  • 05.03.2022

Le FSE+ : des leviers possibles pour répondre aux enjeux mis en exergue par la crise COVID

Quand la crise sanitaire de 2020 est apparue, les experts craignaient des impacts économiques et sociaux très forts. Deux ans plus tard, les impacts à court et moyen termes de la crise, réels et encore mouvants, ne sont pas tout à fait les mêmes que ceux décrits initialement. Les effets observés évoluent au fil du temps et les impacts de long terme sont encore difficiles à estimer.

Si l’économie semble avoir plutôt bien résisté, du fait notamment d’un soutien important de la part des acteurs publics, elle cache des situations très contrastées entre territoires et entre secteurs d’activités. Et les impacts sociaux et sociétaux, importants, varient selon les publics. En effet, la crise a accéléré la mutation de pratiques professionnelles et de formation (place du numérique dans le travail, digitalisation de la formation, mutation de l’organisation au travail, etc.), créant de nouveaux besoins. Le futur Fonds social européen plus (FSE+) 2021-2027, tout en maintenant un soutien à des problématiques qui se perpétuent ou dont le besoin s’est affirmé durant la crise sanitaire (accompagnement des personnes éloignées de l’emploi, formation tout au long de la vie…), pourra être un outil pour répondre aux nouveaux enjeux mis en lumière par la crise.

Des effets différenciés de la pandémie de COVID-19 sur la pauvreté et les inégalités 

Un niveau de pauvreté monétaire stable par rapport à 2019…

En novembre 20211 , une analyse de l’INSEE montre que le taux de pauvreté monétaire2 en France, malgré la crise sanitaire et le ralentissement économique, se maintient à un niveau de 14,6% en 2020. Ce constat est le même au niveau européen qui affiche en juin 20213 un revenu moyen des ménages ainsi qu’un niveau de pauvreté stables. Toutefois, on constate d’importantes différences entre États membres. Ainsi, des pays tels que l’Italie, la Croatie, la Grèce, la Slovénie ou l’Espagne, fortement touchés au début de la pandémie ou ne possédant pas les infrastructures suffisantes pour répondre à la crise, voient leur niveau de pauvreté augmenter : +27% de hausse du risque de pauvreté en Espagne, 9,4% de personnes en pauvreté absolue en Italie contre 7,7% en 2019.

Mais qui dissimule un panorama contrasté selon les publics

Ce bilan rassurant pour la France est toutefois à nuancer puisque la pandémie de COVID-19 a creusé les inégalités préexistantes et augmenté la situation de pauvreté de certains publics4, notamment ceux ne pouvant poursuivre leur activité avec le télétravail (ouvriers et employés). Un rapport rendu par le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale5 mentionne le basculement rapide dans la précarité des travailleurs en contrat de courte durée (CDD ou intérim), des étudiants ou encore des travailleurs indépendants qui se tournent plus largement vers les services sociaux en 20206

La crise sanitaire est à l’origine de problèmes d’insertion de différents publics. À titre illustratif, le secteur de l’intérim a subi une diminution de 30% des contrats conclus en mars 2020 et de 60% en avril de la même année7 et le volume d’embauches de jeunes de moins de 26 ans (en CDI ou CDD de plus de trois mois) a chuté de 14,2% en 2020 par rapport à 2019.

Le rapport du CNLE souligne également les difficultés accrues pour une partie de la jeunesse confrontée à la fois à des difficultés financières (baisse des jobs étudiants par exemple), d’isolement, de mal-logement ou encore de difficultés d’alimentation, auxquelles s’ajoute parfois une fragilisation psychologique. Les plus jeunes sont également fragilisés avec des situations familiales parfois très difficiles (précarité, violences intra-familiales, décrochage scolaire…).

La dernière publication de la Fondation Abbé Pierre8 met en avant des difficultés de logement qui ne cessent de croitre : augmentation du nombre de personnes sans abri, augmentation du nombre de demandes de logements sociaux, accroissement de plus de 154% des prix des loyers en 20 ans… La crise, associée à la réduction du nombre de logements sociaux produits ces deux dernières années, a eu plusieurs effets sur le mal-logement : saturation de l’hébergement d’urgence – malgré une augmentation des places, difficulté d’accession à des logements abordables, risque pesant d’expulsions sans solution à partir du 1er  avril 2022, etc. La Fondation souligne également des effets néfastes de la dématérialisation rapide des services publics liés du logement alors même que la fracture numérique touche une partie des publics concernés. 

Des mesures nationales d’accompagnement en faveur des entreprises et de l’emploi, limitant les effets de la crise 

Un amortisseur social comme base d’une reprise économique

La récession économique attendue à la suite de la pandémie est, dans les chiffres, limitée. Alors que le PIB français a reculé de 8,2% entre fin 2019 et fin 2020, il augmente au premier semestre 2021 de 0,9% et se rapproche aujourd’hui de son niveau de 2019. De même, la situation sur le marché du travail se rapproche de celle d’avant-crise, et les chiffres du taux de chômage ainsi que le taux d’activité sont similaires à 2019. Seules les situations de sous-emploi augmentent avec 7,3% en 2021 par rapport à 5,9% en 2019 (9). Contrairement à ce qui était attendu, le taux de chômage des jeunes se trouve lui aussi légèrement en dessous de son niveau d’avant crise, atteignant 19,8%. À l’échelle européenne, le bilan est plus contrasté, le nombre d’emplois ayant baissé de 5 millions entre 2019 et 2022 à cause de la pandémie de COVID-1910.

Une situation contrastée en Europe


Extrait de la synthèse rédigée par le Comité de suivi et d’évaluation des mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l’épidémie de covid-19 -France stratégie "En 2020, le PIB a décru de 7,9 % en France, contre 6,1 % en moyenne dans l’UE-27 et 6,5 % dans la zone euro. Le PIB a reculé de 8,9 % en Italie, de 9,8 % au Royaume-Uni et de 10,8 % en Espagne. En revanche, la récession a été nettement plus faible en Allemagne, à - 4,8 %. Cet écart entre la France et l’Allemagne provient essentiellement du deuxième trimestre 2020 (-11,2 % contre – 18,4 % en glissement annuel), ce qu’on peut sans doute imputer, au moins en partie, au confinement moins strict outre-Rhin".

L’amélioration de la situation économique depuis 2021, en France, s’explique en grande partie par la réponse apportée par les pouvoirs publics, notamment via le plan de soutien de "France relance"11.

REACT’EU

Dès avril 2020, la Commission européenne a proposé un plan de relance NextGenerationUE pour amortir les effets de la crise sanitaire et ses conséquences économiques et sociales. Ce plan doté de plus de 750 milliards d’euros à l’échelle européenne, intervient en faveur de la politique de cohésion, via l’initiative REACT-EU (acronyme de "Recovery Assistance for Cohesion and the Territories of Europe"). Concrètement, ce sont plus de 3,8 milliards d'euros, pour la France, de fonds supplémentaires mis à disposition du FSE, du Fonds européen de développement régional (FEDER) et du Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD) 2014-2020. Pour le FSE, cela représente 923 M€ supplémentaires (soit 30% de l’enveloppe REACT’EU). Ces ressources visent à réparer les conséquences de la crise engendrée par la pandémie de COVID-19 et à préparer une reprise écologique, numérique et résiliente de l’économie. À titre d’exemple, elles peuvent être mobilisées par les PO régionaux et le PO national pour des actions liées à :

  • la santé, la transition vers une économie verte, soutien aux PME, le numérique et services de base aux citoyens
  • l’éducation, la formation, l’emploi des jeunes, les services sociaux, la préservation de l’emploi et la création d’emplois.

Chaque programme a fait l’objet d’une modification en 2021 pour intégrer ces enveloppes, en articulation avec le Plan national de Relance et de Résilience, soutenu par ailleurs par d’autres instruments de NextGenerationUE.

Des mesures temporaires ont poussé au renforcement de l’assurance chômage12, à la prévention des licenciements, au renforcement de l’assurance maladie, ou de la lutte contre la pauvreté pour les ménages les plus précaires13. Les aides exceptionnelles aux ménages visant principalement les allocataires du Revenu de solidarité active (RSA) et de l’Allocation de solidarité spécifique (ASS), versées courant 2020, ainsi que des primes exceptionnelles pour 500 000 salariés intermittents ont permis de limiter les effets sur l’emploi. Mais c’est surtout le mécanisme d’activité partielle qui est à souligner avec 36 milliards d’euros dédiés en avril 2020 et 8,4 millions bénéficiaires14

Mais des entreprises et des secteurs d’emploi particulièrement touchés

Malgré les aides fournies par les pouvoirs publics, certains secteurs ont été fortement touchés par la crise sanitaire, car contraints de fermer temporairement et de manière prolongée leur activité : c’est par exemple le cas de la restauration ou encore du commerce de détail. La suspension de la production et l’absence de chiffre d'affaires causent de graves difficultés de trésorerie pour les entreprises touchées. La crise crée également un "effet domino", avec une stagnation de l’activité dans certains domaines du fait du manque de clients (commerce de gros alimentaire, produits métalliques…)15.

À l’inverse, certains domaines voient la demande augmenter tels que l’édition de logiciels, l’industrie chimique ou la logistique. 

Par ailleurs, si la part des entreprises insolvables augmente tant pour les Entreprises de tailles intermédiaires (ETI) et les Petites et moyennes entreprises (PME), que pour les micro-entreprises ou les grandes entreprises16, il existe de fortes disparités territoriales sur le territoire national. Les zones d’emploi fortement liées au développement touristique ou concentrant une grande part de travailleurs indépendants ont connu une plus forte dégradation de l’activité17. À l’inverse, les entreprises situées dans des territoires comprenant des districts industriels à forte spécialisation productive et des espaces de coopération inter-firmes, ont pu préserver leurs activités plus aisément. La structure de la clientèle (clientèle diversifiée ou non) a aussi pu jouer un rôle dans la résistance à la crise18.

Une reprise économique qui laisse présager d’importantes transformations à long terme pour l’emploi et la formation

Une carence de main d’œuvre dans certains secteurs entrainant une amélioration des conditions salariales et de travail

De nombreux salariés partis en chômage partiel ne sont jamais revenus à leur activité d’avant crise, ce qui génère aujourd’hui d’importantes pénuries de main d’œuvre, au premier rang desquels l’hôtellerie-restauration, mais aussi le secteur des développeurs informatiques. Si la France enregistre un taux de chômage à 8% en 2021, la levée des contraintes sanitaires a engendré une demande de main d'œuvre accrue de la part des entreprises : 16% de manque d’effectifs était signalé en France, fin 2021. De même à l’échelle européenne, avec un manque de main d'œuvre établi à 28% pour l’Allemagne19
Cette situation de pénurie amène les secteurs touchés à engager une réflexion sur la revalorisation salariale (négociations à l’échelle des branches professionnelles) mais aussi sur le bien-être au travail : aménagement des horaires, pratique du télétravail, formation continue, impact social et environnemental… 

Un recours accru au télétravail, facteur d’amélioration de la qualité de vie pour de nombreux salariés

La gestion des ressources humaines a dû évoluer depuis début 2020 avec le développement croissant du télétravail des salariés. Ainsi, en 2017, seul 3% des salariés français pratiquaient le travail à distance20, tandis qu’aujourd’hui la pratique concernerait un tiers d’entre eux. Le travail à distance génère un besoin croissant de formations dans le domaine du numérique, alors même que les mécanismes de formation continue ont été peu utilisés durant la pandémie : plus de 60% des salariés interrogés dans le cadre de l’étude de la Direction de l’Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques (DARES) n’a pas pu avoir accès à la formation continue en 202021 . 
Cette généralisation du télétravail a modifié le rapport au travail entrainant des changements de vie, des déménagements, le départ des grandes métropoles pour rejoindre des zones littorales et rurales. L’attractivité des territoires est elle-même en grande mutation accélérant les réflexions territoriales autour de la création et du développement des lieux de coworking, des tiers-lieux. 

À terme, le développement du télétravail interroge toutefois sur le développement de nouvelles formes d’inégalités, puisque la pratique du télétravail reste dépendante de la possession d’un logement approprié, ou du domaine d’exercice des salariés, obligeant à repenser les espaces et les modalités d’exercice du travail salarié. Il est à noter que le télétravail s’est surtout imposé dans les grandes sociétés et dans les services nécessitant moins un travail en présentiel : information et communication (64 %), activités de conseil (53 %), enseignement (35 %). En revanche, il est demeuré marginal dans les activités industrielles ou de services à la personne22.

De nouveaux enjeux de formation stimulés par le numérique

D’un point de vue de la formation, la crise a marqué un coup d’arrêt de la formation continue : de nombreuses entreprises ont fait le choix de geler leur plan annuel de formation durant l’année 2020. À la fin de 2020, 16 % des salariés des entreprises privées de plus de 10 salariés ont accédé à la formation, et pour seulement 6 % d’entre eux cela a pu être le cas grâce à une convention FNE-Formation23. La crise sanitaire a pourtant généré de nouveaux besoins. Les salariés expriment un besoin croissant de formation. La réforme de la formation professionnelle et la création du compte personnel de formation (CPF) en France l’a montré : aujourd’hui, 63% des salariés seraient prêts à se former en dehors de leur temps de travail et 36% à leurs propres frais24, élément facilité par la formation à distance.

L’utilisation accrue du numérique pendant la crise sanitaire stimule la formation à distance avec des modèles d’apprentissage mixte (numérique/physique) en hausse de 10% par rapport à 2019. Le numérique devient plus que jamais un outil crucial dans l’éducation et la formation, favorisant le développement de pratiques pédagogiques innovantes (pédagogie inversée…). Il a également conduit à l’expansion des apprentissages en ligne, selon les domaines, ainsi qu’à l’augmentation de la formation en situation de travail (FEST), plus propice à un apprentissage accéléré et adaptable. Il est à noter néanmoins que la formation en ligne engendre des coûts importants, liés à l’achat d’équipements informatiques, ce qui peut être un frein pour les TPE et PME25

La nécessité de développer les compétences numériques et de lutter contre l’illectronisme

La place du numérique étant accrue, tant via la pratique du télétravail que le développement des nouvelles formes d’apprentissage et de formation, il génère également un renforcement du besoin en "compétences générales, ou soft skills" (34% selon les DRH) ainsi qu’en outillage technologique (33%)26. La période a mis en avant “l’obsolescence des compétences", ainsi qu’un besoin d’autonomisation des salariés et de compétences de gestion ou managériale (citées par 34% des DRH, contre 22% en 2020). Par ailleurs, les mutations liées au COVID-19 entraînent un besoin croissant de formation des adultes, face à l’évolution des compétences : nouvelles technologies, gestion à distance, autonomisation… Compétences qui deviennent incontournables mais auxquels certains adultes ne sont pas formés.  

Mais le numérique est aussi un enjeu pour les demandeurs d’emplois et un prérequis pour la réussite du parcours de recherche d’emplois, de logement, d’aides sociales… Il facilite l’accompagnement des personnes en insertion, réduisant les temps de recherche d’information administrative, et concentrant le travail des chargés de mission insertion sur la personnalisation du soutien. 

Un exemple de projet pour lutter contre l’illectronisme

Emmaüs Connect est engagé depuis plusieurs années dans la lutte contre la fracture numérique. La crise a isolé de façon encore plus forte les personnes ne bénéficiant pas de matériel (ordinateur, smartphone) et/ou ne maîtrisant pas les usages du numérique. Pour lutter contre cet isolement, Emmaüs Connect, met en place des points d’accueil (comme à Créteil en 2021), aux côtés d’autres acteurs du territoire. "Nous proposons une offre unique qui permet d’équiper, connecter et accompagner les personnes dans le besoin dans leurs premiers usages du numérique. […] Pour accéder à ces services, l’orientation par une structure de l’action sociale est nécessaire." Emmaüs Connect participe également à d’autres projets permettant d’accompagner les personnes dans une démarche d’insertion professionnelle. C’est le cas d’un projet avec Pôle emploi et le Département du Val-de-Marne qui soutient des parcours d’initiation au numérique. Ce projet, financé par le FSE, permet d’offrir un accompagnement global sur l’accès et l’usage du numérique et de transmettre les compétences numériques de base.

Le FSE, réel outil pour contribuer à résorber les impacts de la crise à court et long termes

Ainsi, la crise sanitaire a entrainé depuis 2020 des conséquences multiples sur la situation économique et sociale de la France et de ses différents territoires. Cette crise a renforcé des besoins du marché du travail et notamment les difficultés d’accès à l’emploi des publics les plus vulnérables. Phénomènes déjà présents, les risques de décrochage d’une partie de la population à bas niveau de qualification, dépendante des minimas sociaux, menacés par la précarité grandissante et l’insuffisance de création d’emploi se sont accentués par le ralentissement de l’activité économique. De plus, la pauvreté et les inégalités se sont davantage révélées, voire accélérées avec cette crise sanitaire. Les choix stratégiques de mobilisation du FSE en France, tous programmes confondus, étaient déjà positionnés sur ces enjeux d’accompagnement des personnes éloignées de l’emploi, de déploiement de l’outil de formation, de lutte contre la pauvreté et les inégalités. Leur mobilisation pendant la crise a donc permis de continuer de soutenir ces publics fragilisés.

On peut penser que la mobilisation de REACT-EU au titre du FSE, en France, permet de renforcer l’intervention :

  • Vis-à-vis de publics particulièrement touchés par la crise, notamment les inactifs, les jeunes et les demandeurs d'emploi de longue durée, à travers notamment l’amélioration de l'offre d'insertion dans ce contexte mais aussi le développement de services accessibles atténuant les risques de décrochage social par exemple ; 
  • En faveur du développement de compétences pour l’accès à un marché du travail fragilisé et plus sélectif en encourageant le recours aux ressources numériques éducatives ;
  • En faveur de la formation professionnelle des demandeurs d’emploi et l’acquisition de compétences dans une logique d’augmentation ou d’adaptation de l’employabilité des publics concernés 
     

Les fonds REACT-EU sont mobilisables depuis fin 2021 pour le programme opérationnel national et les PO ultra-marins. Ils ont fait l’objet dans certains territoires d’appels à projets. En Martinique par exemple, les fonds REACT financent entre autres des projets, comme celui du régiment du service militaire adapté, à destination des jeunes particulièrement touchés par la crise et dont certains ont fait face à une rupture de parcours scolaire ou de formation pendant ou à l’issue des différents confinements. 

Pour la période 2021-2027, le FSE+ permettra de continuer de répondre aux grands enjeux mis en avant par la crise : 

  •  L’accompagnement des personnes éloignées de l’emploi ; 
  • La formation professionnelle tout au long de la vie de façon à adapter ses compétences et maintenir son employabilité ; 
  • La lutte contre l’abandon précoce des parcours engagés (qu’il s’agisse de décrochage scolaire ou d’abandon / de rupture de parcours pendant une formation ou pendant un accompagnement) ; 
  • L’appui à la création d’activité notamment par des publics demandeurs d’emploi (Cf. exemple de Lulu dans Ma Rue ci-après).

Un exemple de projet sur l’entrepreneuriat par les personnes éloignées de l’emploi : Lulu dans ma rue (Paris)

Lulu dans ma rue (LDMR) est né en 2015 d’un triple constat :

  • Beaucoup de personnes en grande fragilité sociale ont besoin d’une activité professionnelle pour reprendre confiance, se reconstruire et s’assumer financièrement. Pour autant, le cadre du salariat n’est pas toujours le plus adapté. Le micro-entrepreneuriat peut représenter une opportunité intéressante pour permettre à ces personnes de valoriser leurs compétences et les partager avec les autres.
  • Le territoire de Paris fait face à l’isolement d’une partie de sa population.
  • Le quartier est la bonne maille territoriale pour créer du lien et offrir un service utile à tous.

Financé par la Ville de Paris, le FSE et l’Etat, LDMR est une SAS (Société par actions simplifiées) agréée ESUS (Entreprise solidaire d’utilité sociale), comptant environ 60 salariés aujourd’hui (dont 7 personnes dans le Pôle Professionnalisation et 10 animateurs de quartier). Elle combine un système de mise en relation de particuliers à la recherche d’opportunités professionnelles avec des citadins qui ont besoin d’un coup de main (ménage, bricolage, informatique…), une équipe d’accompagnement socio-professionnel et une animation du domaine public (kiosques de conciergerie solidaire). Lulu dans ma rue est aussi la première EiTI - entreprise d’insertion par le travail indépendant – s’appuyant ainsi sur l’entrepreneuriat comme levier du retour à l’emploi pérenne. 

Pour les entrepreneurs qui le souhaitent (et éligibles à l’IAE), la structure leur propose un dispositif d’accompagnement individualisé et renforcé socio-professionnel comprenant un diagnostic socio-professionnel et un accompagnement jusqu’à 24 mois. A noter que certains ne souhaitent pas être accompagnés. De même, chacun peut choisir son temps de travail et son type de travail. Chaque parcours d’accompagnement s’adapte aux besoins de la personne.

L’objectif initial est de pouvoir accompagner au moins 400 personnes par an. 330 personnes ont pu l’être en 2020 (baisse de de l’activité lié à la crise sanitaire). 31% des sorties sont jugées positives (se répartissant équitablement entre sortie en emploi durable, micro-entreprise avec un revenu au-dessus du seuil de pauvreté et sortie vers une formation qualifiante). Un quart sortent aussi en générant un complément d’activité (complément de revenu, de retraite…) qui leur suffit. Au-delà du type de sorties, les personnes se créent un vrai réseau amical et/ou professionnel, acquièrent une autonomie forte, développent des compétences métiers et soft skills, le tout participant à la sécurisation de leur parcours.

L’importance de mixer des approches à la fois d’accompagnement purement social, d’accompagnement socio-professionnel, de soutenir des projets favorisant de nouvelles approches (innovation sociale) ressort comme un enjeu toujours aussi fort pour les années à venir. 

Le FSE+ permettra aussi de soutenir des projets ou des actions dans des domaines beaucoup plus larges que ceux couverts par le FSE sur la période 2014-2020. En premier lieu, il pourra soutenir des opérations entièrement dédiées à l’accompagnement social des personnes. La crise a montré à quel point ces freins à l’emploi étaient majeurs : la santé en premier lieu (dont les problématiques de santé mentale) mais aussi le logement ou la garde d’enfants. La crise a aussi souligné l’importance toujours croissante des soft skills, de l’adaptation permanente, de notre façon d’appréhender des environnements incertains et mouvants. Le FSE+ apparait comme un outil intéressant car il répond à plusieurs enjeux exacerbés par les effets de la crise et touche les publics les plus en difficultés sur le marché du travail. 

(1) INSEE, Estimation avancée du taux de pauvreté monétaire et des indicateurs d’inégalités, Insee Analyses, n°70, 2021
(2) Pauvreté monétaire : Un individu (ou un ménage) est considéré comme pauvre lorsqu'il vit dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté. En France et en Europe, le seuil est le plus souvent fixé à 60 % du niveau de vie médian (INSEE)
(3) Eurostat, Early estimates of income inequalities during the 2020 pandemic, 2021
(4) Futuribles, En France, les inégalités se stabilisent, la pauvreté augmente, novembre 2021
(5) CNLE, La pauvreté démultipliée : dimensions, processus et réponses, printemps 2020-2021, 2021
(6) Ibid
(7) France stratégie, "Un an de crise sanitaire : état des lieux du marché du travail et enjeux pour la relance", avril 2021
(8) 27e rapport sur l'état du mal-logement en France 2022
(9) Comité d’évaluation de la Stratégie nationale de prévention et lutte contre la pauvreté, "La lutte contre la pauvreté au temps du coronavirus : constats sur les effets de la crise sur la pauvreté et points de vigilance du comité d’évaluation de la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, note d’étape", Octobre 2021 
(10) CEDEPOF, "Coronavirus impact on jobs in EU sectors and occupations: a skills forecast analysis", 2021
(11) Comité d’évaluation de la Stratégie nationale de prévention et lutte contre la pauvreté, "La lutte contre la pauvreté au temps du coronavirus : constats sur les effets de la crise sur la pauvreté et points de vigilance du comité d’évaluation de la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, note d’étape", Octobre 2021
(12) Décret du 29 Juillet 2020, fixant temporairement à quatre mois, au lieu de six mois, la durée minimale de travail pour ouvrir ou recharger les droits à l’assurance chômage 
(13) Comité de suivi et d’évaluation des mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l’épidémie de COVID-19, rapport final, 2021
(14) Ibid
(15) DARES, "Impact de la crise sur les entreprises et les organismes de formation", 2021
(16) Direction générale du Trésor, "L’impact de la pandémie de COVID-19 sur les entreprises françaises", Avril 2021 
(17) France Stratégie, “Un an de crise sanitaire : état des lieux du marché du travail et enjeux pour la relance”, avril 2021 
(18) DARES, "Impact de la crise sur les entreprises et les organismes de formation", 2021 
(19) DARES, "Quelle relation entre difficultés de recrutement et taux de chômage ?", Octobre 2021 
(20) DARES, "Quels sont les salariés concernés par le télétravail ?" DARES Analyses, n°051, 2019 
(21) DARES, "Impact de la crise sur les entreprises et les organismes de formation", 2021
(22) L’impact de la crise sanitaire sur l’organisation et l’activité des sociétés, C. Duc, C. Souquet, Insee Première n°1830, 2020
(23) Ibid. 
(24) Ibid. 
(25) Ibid. 
(26) CEGOS baromètre, La crise sanitaire a modifié significativement et durablement la formation en entreprise, 2021