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  • 17.12.2020

L'évaluation de l'axe 2 du Programme opérationnel FSE 2014-2020 élargie aux seniors

Le marché du travail est en transformation et en mutation continue : anticiper les évolutions économiques, accompagner et former les salariés les plus fragiles… L’axe 2 du PO FSE s’inscrit dans une logique d’adaptation des compétences et de meilleure prise en compte de certains publics plus fragiles sur le marché du travail. Cet axe répond directement aux besoins des entreprises et des travailleurs. L’objectif de l’évaluation de cet axe est d’analyser ce qui a été mis en œuvre et de comprendre les freins et les réussites ainsi que de mesurer les effets sur les publics, les structures et les territoires. Découvrez le décryptage de « l’Évaluation d’impact de l’axe 2 du Programme opérationnel national FSE 2014-2020, élargie à toutes les opérations du PO FSE pour le public senior ».

1. Mieux comprendre l'axe 2, le contexte et ses thématiques

L’évolution du cadre de la formation a modifié le contexte de mise en œuvre du Programme

L’axe 2 du PO FSE offre un large soutien, d’une part, à l’accompagnement des licenciés économiques à travers le Contrat de sécurisation professionnelle (CSP) et, d’autre part, à la formation professionnelle des actifs occupés. Deux enquêtes auprès du public bénéficiaire ont été réalisées. Les actions soutenues ont pour principal impact le maintien dans l’emploi ainsi que l’accès à des parcours de formation. Les offres d’accompagnement ont évolué ces dernières années en lien avec le contexte économique et législatif.

En effet, le système de formation professionnelle a été renforcé avec la mise en place du Compte Personnel Formation (CPF) et la modularisation des parcours de formation. Par ailleurs, le Contrat de sécurisation professionnelle (CSP), mis en place par la loi en 2011, a connu plusieurs évolutions tant dans son contenu que dans sa gouvernance. Le Plan d’investissement dans les compétences sur la période 2018-2022, quant à lui, permet de financer des appels à projets et des expérimentations destinés à répondre à des besoins spécifiques de l’économie et à la transformation des compétences.


La formation est l’un des enjeux clés de la sécurisation des parcours et de ce fait, elle irrigue l’ensemble des politiques et des dispositifs mis en œuvre sur la période 2014-2020. Elle est, dans la très grande majorité des cas, couplée à d’autres formes d’actions.

Le rapport indique que la "proportion de professions hautement qualifiées dans l’emploi total augmente progressivement, de 40,6 % en 2009 à 46,6 % en 2018, alors que la part des emplois peu ou pas qualifiés diminue". Selon l’enquête Besoins en main d’œuvre de Pôle emploi, la part des projets de recrutement jugés "difficiles" par les entreprises a considérablement augmenté au cours des dernières années, passant de 32,4% en 2015 à 44,4% en 2018. Par ailleurs, 64% des Français souhaitent engager une reconversion professionnelle, dans un contexte où une pénurie de travailleurs qualifiés et non-qualifiés est observée dans certains secteurs dont le numérique.

Il ressort donc à la fois « une inadéquation des compétences mettant en tension certains métiers ou certains secteurs, une sous-qualification d’une partie de la population au regard du niveau requis pénalisant alors les actifs les moins formés, et une difficulté du monde économique et des acteurs de l’emploi à mettre en place des parcours adaptés pour les individus ».

Six objectifs spécifiques et un objectif unique


L’axe 2 se compose de deux priorités d’investissement et de six objectifs spécifiques :

L’accompagnement des licenciés économiques à travers le contrat de sécurisation professionnelle (PI 8.5 – OS 4) et, le soutien de la formation professionnelle des actifs occupés (PI 8.5 OS 3) sont les deux objectifs principaux de l’axe 2 avec respectivement 47 % et 37 % des crédits européens programmés.

L’évaluation d’impact de l’axe 2 a permis d’observer une plus grande difficulté à mobiliser des crédits et des projets sur les thématiques de l’égalité salariale et professionnelle (PI 8.5 - OS 2) et le vieillissement actif (PI 8.6), et dans une moindre mesure de la GPEC et les mutations économiques (OS 1 et 5), notamment en raison d’un manque de moyens des autorités de gestion déléguées, associé à une priorité clairement donnée aux objectifs spécifiques.

La place des seniors et l’avancée de l’égalité professionnelle


L’axe 2 permet également de soutenir d’autres thématiques telles que :

• La démarche de Gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC), afin d’améliorer la prise en compte par l’ensemble des acteurs, notamment des chefs d’entreprise, des enjeux de ressources humaines et de compétences en lien avec les mutations économiques.


• L’égalité salariale et professionnelle entre les hommes et les femmes. Si la féminisation du marché du travail se poursuit avec 83% de femmes âgées de 25 à 49 ans actives contre 93% des hommes en 2017, les femmes travaillent plus souvent à temps partiel, et souvent subi, occupent plus souvent des emplois à bas salaires et accèdent moins aux postes de responsabilité. La mise en place de l’index d’égalité femmes-hommes, à la suite de la loi du 5 septembre 2018, semble avoir incité les entreprises à être plus attentives aux différents critères qui encouragent une meilleure égalité entre les femmes et les hommes.


• Ou encore le vieillissement actif, problématique importante, en particulier sur certains territoires dont la pyramide des âges des travailleurs est plutôt vieillissante, et pour le maintien des seniors dans l’emploi et l’amélioration de leurs conditions de travail.


La place des seniors dans la programmation 2014-2020 a par ailleurs fait l’objet d’une évaluation. Il est question de personnes âgées de 55 à 64 ans qui représentent 12,6 % de la population totale française au 1er janvier 2020 et 7,5% des participants des participants du PON FSE. Les seniors sont un public majoritairement accompagné au titre de l’axe 3 relatif à l’inclusion active. Un questionnement fort a émergé sur la fin de période de programmation, notamment en raison de la commande par le Premier ministre en 2019 dans le cadre de la préparation du projet de loi de réforme des retraites d’une mission spécifique pour évaluer les leviers les plus efficaces en matière de maintien en emploi des seniors.

En effet, le taux d’emploi des 55-64 ans est plus faible en France que pour l’ensemble de l’Union européenne (52,1% contre 58,7% en 2018) et le taux de chômage des seniors est en augmentation depuis ces dix dernières années. C’est pourquoi les trois axes du Programme opérationnel national 2014-2020 sont concernés par la problématique des seniors dans l’emploi.

LA MÉTHODOLOGIE DE CETTE ÉVALUATION

Fin février 2020, le montant programmé UE de l’axe 2 était de 575 M€ (taux de programmation : 85%) pour 920 opérations ayant permis d’accompagner 254 000 participants sur l’ensemble du territoire national.

L’évaluation s’est déroulée entre avril et août 2020, autour de deux grandes étapes :

• L’analyse de la programmation
• La mesure des impacts et la formulation du jugement évaluatif


Au total, 43 entretiens qualitatifs ont été menés : 15 entretiens avec des institutionnels comme la DGEFP, Pôle Emploi, l’ANACT, l’AVE, France Compétences… et 28 avec des porteurs de projet. Deux enquêtes relatives aux effets de la formation sur les actifs occupés et salariés licenciés ont été réalisées.

 


2. Résultats, réalisations et effets de l'axe 2 du POn FSE 2014-2020

Résultats globaux : des opérations conformes aux ciblages des besoins

10,4%
des participants de l’axe 2 ont plus de 54 ans
Près de 50%
des participants sont en emploi
Près de 50%
des participants sont licenciées

Les opérations soutenues par le Fonds social européen favorisent la sécurisation des parcours professionnels, et ce, quel que soit le profil des bénéficiaires. Toutefois, l’évaluation n’a pas permis de mesurer la contribution du FSE à la redynamisation sectorielle et/ou territoriale compte tenu de démarches très différentes selon les territoires et selon les écosystèmes (Objectif spécifique 1) et à la non-mobilisation de l’Objectif spécifique 5. La dynamique de programmation sur le vieillissement actif a été ralentie en raison de la difficulté à trouver des cofinancements et du faible nombre d’opérateurs et les démarches en matière de GPEC sont également dépendantes des structures porteuses dans les différents territoires.

Concernant la thématique de l’égalité professionnelle, 122 opérations ont porté sur des sujets tels que la production d’observatoires Egalité Femmes-Hommes, la sensibilisation des employeurs et direction de Ressources humaines, la transmission de bonnes pratiques, l’accompagnement des entreprises dans leurs démarches « égalité », la découverte de métiers pour vaincre les stéréotypes de genre, etc. La dynamique initiée par le gouvernement ces dernières années n’a pas été observée dans le cadre de la programmation du FSE. Malgré des appels à projets, et une sollicitation directe d’acteurs du territoire, la programmation a peiné à décoller avec un taux de programmation de 41 % pour l’Objectif spécifique 2.

La formation, un objectif spécifique bien maîtrisé


En revanche, cette programmation s’est avérée dynamique et stimulée avant tout par le soutien à la formation des actifs occupés et des licenciés économiques. L’Objectif spécifique 4 est porté intégralement par le volet national avec plus de 127 000 participants pour près de 290 M€ programmés (crédits UE) et plus de 900 opérations.

Quant à l’OS3, il représente, en volume financier, en nombre d’opérations ainsi qu’en nombre de participants le deuxième objectif spécifique le plus important de l’axe 2 : plus de 213 M€, 266 opérations et plus de 118 000 participants.
 

L’OS3, UNE ENQUÊTE ET SES RÉSULTATS

Une enquête en ligne a été menée auprès des participants des opérations de l’OS3, sous forme d’un questionnaire transmis par mail. L’enquête concernait toutes les personnes ayant bénéficié d’au moins une formation entre le 1er janvier 2014 et le 1er juin 2020, cofinancée par le FSE (les personnes ont également pu suivre d’autres formations sur la période, non cofinancées par le FSE). Son objectif était de recueillir des éléments qualitatifs sur l’évolution des parcours des participants. Plus de 49 000 participants ont été contactés. Au total, 4 788 réponses étaient exploitables.

77% des répondants indiquent que les formations s’inscrivent dans un projet professionnel. 28% de ces personnes indiquent avoir élaboré leur projet en priorité grâce à l’aide de leur employeur. Aujourd’hui, 50% des répondants occupent un poste identique à celui d’avant les formations. C’est particulièrement vrai pour les personnes qui ont suivi leur formation dans l’entreprise où ils travaillent toujours, à 88%. En parallèle, 55% des personnes ayant suivi leur formation dans leur ancienne entreprise indiquent que cela a eu un impact sur leur changement d’employeur. A la suite des formations, 39% des répondants ont obtenu une qualification (diplôme, titre ou certification professionnelle). Ce taux est plus élevé que celui observé sur l’ensemble de l’OS3 (32%).


L’analyse des effets des actions des OS3 et OS4 de l’axe 2 montre que :

• Les effets observés sont cohérents avec les motivations des participants lorsque les salariés actifs entament une démarche de formation : montée en compétences, renforcement de l’employabilité (interne ou externe à l’entreprise).


• Les formations suivies s’inscrivent bien dans une logique de parcours professionnel et concernent davantage le renforcement de compétences qui se traduit par un maintien de l’emploi dans l’entreprise initiale, principalement lorsque la formation est proposée par l’employeur, ou dans une autre entreprise (principalement lorsque les individus sont à l’initiative de leur formation).


• Pour les bénéficiaires du Contrat de sécurisation professionnelle, CSP-FSE, l’accès à la formation peut les avantager sur le long terme mais diffère le retour à l’emploi. Par ailleurs, des résultats différents se dégagent selon le profil des participants : l’accès à l’emploi est plus marqué pour la tranche d’âge des 25-45 ans et pour les personnes ayant entre 2 et 4 ans d'ancienneté dans leur entreprise au moment du licenciement. Le taux de retour à l’emploi est également plus marqué pour les hommes et dans les grandes entreprises.


Toutes dates d’entrée confondues, les profils de participants se distinguant par de meilleurs taux de retour à un emploi à l’issue du CSP sont liés à :

L’âge : ce critère est celui qui impacte le plus nettement le retour à l’emploi avec un écart de plus de 30 points entre l’accès à l’emploi des 25-45 ans (73 %) et des plus de 54 ans (40 %) ;


L'ancienneté dans l’entreprise avant licenciement : d’après ce critère, les participants ayant 2 et 4 ans d’ancienneté obtiennent un meilleur taux de retour à l’emploi (73 %) (ils ne représentent que 25 % des répondants) que ceux dont l’ancienneté dépasse 5 ans, sachant que ceux ayant plus de 15 ans d’entreprise ont le moins bon taux de retour (moins de 60 %). A noter également que l’ancienneté peut être directement liée à l’âge des participants notamment pour ceux ayant plus de 15 ans d’ancienneté ce qui explique aussi les résultats moins bons pour cette catégorie de personnes ;


Le sexe : le taux de retour est supérieur de 2 points pour les hommes (66 %) ;


La taille de l’entreprise avant licenciement : le taux de retour à l’emploi est meilleur dans les grandes entreprises de plus de 250 salariés (supérieur de 2 points par rapport aux TPE et PME).

La place des seniors et le vieillissement actif


Concernant les seniors, tous axes confondus, ils représentent 7,6 % des participants du PO FSE. Ce sont principalement des personnes de faible niveau de qualification (70 % de CITE 0, 1 ou 2), et des demandeurs d’emplois pour près de 60%. Ils sont accompagnés majoritairement au titre de l’axe 3 (inclusion active).

En effet, la prise en compte des seniors de plus de 54 ans dans le PO FSE, c’est :

• 83 % des participants seniors qui relèvent de l’axe 3 au titre des opérations d’inclusion active ;

• 12 % qui relèvent de l’axe 2 et plus particulièrement au titre des opérations d’adaptation au changement des travailleurs ;

• 5 % qui relèvent de l’axe 1, au titre des opérations d’accès à l’emploi.

L’objectif spécifique l’axe 2 relatif au vieillissement actif et en bonne santé avait pour ambition de mettre en lumière des stratégies de gestion des âges en entreprise afin de maintenir les seniors dans l’emploi et d’améliorer leurs conditions de travail. Et l’axe 2 apparaît comme celui qui présente la plus forte part des seniors : 10,4 % des participants ont 54 ans ou plus.

Les participants seniors bénéficient en particulier d’opérations de formation des salariés licenciés, dans le cadre du Contrat de sécurisation professionnelle ou de plans de formation. Les premières conclusions du rapport de l’axe 2 font notamment état d’un changement de perspective sur la gestion des âges de la part des structures accompagnantes.
 

 

LES RÉSULTATS POUR LES SENIORS EN FONCTION DES OBJECTIFS SPÉCIFIQUES

Pour les opérations « Parcours de formation des salariés en CSP » (OS4), l’accès à la formation à la sortie est plus limitée pour les seniors (9,5%) que pour les autres classes d’âges (11% pour 25-54 ans et 14% pour les -25 ans).

Pour les opérations d’accès à la formation des actifs occupés les moins formés (OS3), le rapport relate un très faible accès des seniors à la formation à la sortie des opérations, moins que les autres classes d’âges. En revanche, l’accompagnement leur permet d’accéder davantage que les autres au statut d’entrepreneur et indépendant à la sortie (près de 4%, contre 2% pour les 25-54 ans).

Pour les opérations de soutien aux démarches des employeurs, des branches et des territoires (OS1), la part de seniors en emploi à la sortie des opérations est plus faible que les autres classes d’âges, mais un bien meilleur accès au statut d’entrepreneur ou d’indépendant.


Si les effets des actions sur ce public semblent atténués par rapport aux autres publics à la sortie des opérations, l’emploi durable est de 10 points de % supérieur. Six mois après la sortie des opérations, le taux d’emploi évolue peu, contrairement aux jeunes. L’âge joue comme un facteur négatif. Les 54 ans et plus sont environ 33 % à être en emploi 6 mois après l’opération, contre environ 59 % des moins de 25 ans et 41 % des 40-53 ans. Cela est dû aux nombreux freins qu’ils rencontrent tant culturels, stratégiques que financiers, freins qui dépassent le FSE et renvoient à la nécessité d’une prise en compte spécifique de ce public.

Davantage une sensibilisation qu’un véritable effet que l’évaluation a tout de même permis de mettre en lumière, avec une prise de conscience dans les pratiques des employeurs : « Les projets FSE ont permis d’impulser auprès des salariés et des encadrants/managers une nouvelle « culture » d’agir sur les problématiques des âges ».

Conclusions


Le Fonds social européen vient renforcer les dispositifs classiques de formation professionnelle et permet de toucher un public plus large. Et particulièrement pour les OS3 (parcours d’accès à la formation des actifs occupés les moins formés) et OS4 (parcours de formation des salariés en CSP).

Les analyses sur l’ensemble de l’impact de cet axe 2 montrent une diminution de la part des participants demandeurs d’emploi (-7 points), au profit de l’accès à l’emploi (+ 1 point) et surtout de l’accès à la formation (+ 6 points). L’axe a ainsi un double effet : le maintien dans l’emploi des actifs occupés et l’accès à la formation ou à l’emploi des licenciés économiques.

L’évaluation montre aussi que la mobilisation de l’axe 2 du FSE a pu avoir des effets sur les structures, tels que le renforcement des partenariats locaux, une implication plus forte des entreprises et des employeurs, notamment en termes de formation.

Globalement, les effets de l’axe 2 sont jugés positifs « sur le maintien dans l’emploi et la sécurisation des parcours professionnels, en direction notamment de publics moins qualifiés, mais aussi sur les structures porteuses de projet ».

Toutefois, le rapport permet de comprendre une certaine forme de dépendance de la programmation de l’axe aux dispositifs des politiques publiques que le FSE vient renforcer. Ce positionnement pourrait limiter l’impact du Fonds social européen qui s’il a un réel effet volume par le nombre de personnes accompagnées ne joue pas comme levier majeur.

Quatre recommandations ont été formulées pour la prochaine période de programmation :

1. Continuer de soutenir ces dispositifs, en insistant davantage encore sur les publics qui en ont le plus besoin.
2. Élargir la typologie de projets éligibles.
3. Inciter davantage à la conduite de projets innovants, en particulier sur les thématiques « Égalité professionnelle » et « Vieillissement actif ».
4. Mieux prendre en compte la dimension territoriale dans la répartition de la maquette dédiée à cette priorité.