- Article
-
Insertion
- Ile-de-France
Association Territoires : rencontre avec son directeur, Salah Taibi
Pour permettre aux participants d’acquérir des gestes professionnels et de s’insérer sur le marché du travail, l’association Territoires (Ile-de-France) propose un chantier d’insertion dans les secteurs de l’environnement et de la nature : aménagement des jardins, entretien des potagers, production et commercialisation de légumes bio… Rencontre avec Salah Taibi, directeur de l’association Territoires !
Expliquez-nous en quelques mots le chantier d’insertion porté par l’association ?
Salah Taibi : L’association Territoires est une structure d’insertion par l’activité économique (IAE) conventionnée par les services de l’État et qui porte un atelier chantier d’insertion autour du maraîchage et de la protection de l’environnement depuis maintenant 23 ans. Il s’agit d’un dispositif qui permet à des personnes éloignées de l’emploi, et qui ont des difficultés à trouver du travail dans le secteur marchand, de pouvoir mieux s’insérer dans le marché du travail.
Comment cette initiative a-t-elle été mise en place ?
Salah Taibi : Nous avons repris des terrains et des friches laissés à l’abandon depuis les années 70 pour les transformer en jardins. Avec l’association Territoires, nous avons pensé à la logique de reconquête écologique mais aussi à la requalification des Hommes. « Territoires » c’est conjuguer insertion professionnelle et les questions de développement durable. Ainsi nous avons lancé la démarche sur un site d’un hectare à Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis, aménagé et créé des jardins familiaux, une serre, un jardin pédagogique, une maison de l’écologie, et rénové des anciens corps de ferme pour y installer nos locaux. Le maraîchage bio est le cœur de notre dispositif mais nous avons également des jardins partagés dans les Quartiers prioritaires de la ville (QPV) par exemple. Nos employés produisent des légumes bio, de saison, à partir du mois de mars-avril avant de les commercialiser à un réseau d’abonnés. Des familles des quartiers environnants s’abonnent à nos légumes toute l’année. Nous avons créé toute une dynamique, ainsi qu’une activité économique.
Quel type de public accompagnez-vous ?
Salah Taibi : Le public que nous accompagnons vient de tous les horizons. Ce sont globalement des personnes qui rencontrent des difficultés à trouver du travail dans le secteur marchand, plus précisément des bénéficiaires du RSA, de l’Allocation Solidarité Spécifique (ASS), des seniors sans emploi, toutes les populations éligibles au contrat aidé et d’insertion (CDDI), des réfugiés... Nous leur proposons un contrat de travail, socialisant et professionnalisant, avec des activités autour de l’environnement et des métiers verts.
Les personnes sont orientées par des prescripteurs professionnels de Pôle emploi notamment, des référents PLIE ou des Maisons de l’emploi, des Missions locales ou Cap emploi. Nous faisons passer un entretien d’embauche comme n’importe quel emploi. La personne doit être éligible, mais également motivée, avec un véritable projet professionnel. L’intitulé du poste que nous proposons est « Agent polyvalent de l’environnement et de la nature » (un CDD de 26 heures par semaine), l’objectif est de découvrir les différentes facettes des métiers. Les personnes embauchées restent maximum 24 mois au sein de notre structure. Certains partent avant du fait d’une opportunité.
Pouvez-vous nous expliquer plus en détails quelles sont les étapes du chantier d’insertion ?
Salah Taibi : Les structures d’insertion sont des dispositifs professionnalisant. L’idée est de travailler sur le parcours de la personne et de construire sa montée en compétences. Au début de leur prise de poste, les participants ont des ateliers et d’adaptation au poste pendant 26 heures pendant lesquels les encadrants techniques les accueillent, leur montrent les outils et le matériel.
Ensuite ils sont reçus par notre Chargée d’insertion professionnelle (CIP), qui s’occupe de l’accompagnement social et professionnel. Elle établit un diagnostic pour repérer les fragilités et besoins de la personne, mais cherche aussi à trouver des solutions pour d’autres sujets comme l’accès aux soins, le logement… Nous essayons de résoudre les problèmes au fur et à mesure à la fois en interne et avec nos partenaires. L’objectif est que la personne soit sereine et qu’elle puisse s’investir dans son travail. Mais attention, elle doit également être acteur de son accompagnement !
Nous faisons beaucoup d’ateliers en situation de travail (découvrir le matériel, le cycle végétatif, la sécurité au travail). Il y a aussi des “face-à-face” pédagogiques, des cours de formation dans le cadre de la formation professionnelle autour des métiers du paysage, etc. Avec comme objectif de les amener vers des certifications partielles.
En quoi l’environnement et la protection de la nature jouent-ils un rôle dans la réussite de ce projet ?
Salah Taibi : Travailler en plein air est très intéressant et attrayant pour le public que nous accompagnons. La production de légumes, c’est structurant car vous partez d’une graine et n’obtenez des légumes qu’au bout de plusieurs mois d’un travail régulier et appliqué.
Le fait de vendre ses produits est valorisant pour les personnes intégrées au dispositif. Elles sont également fières de vendre des produits labellisés par l’agriculture biologique. L’association Territoires a d’ailleurs fait partie des pionniers des productions bio en Ile-de-France !
Quel a été le rôle du Fonds Social Européen dans cette initiative ?
Salah Taibi : Le rôle du Fonds Social Européen a été un financement important à travers le PLIE. Cette aide nous a permis de financer une grande partie de l’activité du chantier d’insertion, et essentiellement l’accompagnement des personnes, le matériel pour travailler sur l’exploitation, ainsi que la logistique des salariés et de l’activité. Dans les financements dont nous bénéficions, après l’aide au poste, celui du FSE est le plus important.
Quelles sont vos perspectives pour l’année à venir ?
Salah Taibi : Nous avons trois objectifs principaux. Le premier serait d’augmenter nos capacités d’accueil. Actuellement, nous embauchons entre 25 et 30 personnes tous les ans. Nous sommes conventionnés pour 13 et demi équivalents temps plein. Notre objectif est de passer à 14 ou 15 équivalents temps plein, c’est-à-dire 4 à 5 personnes de plus, soit environ 35 personnes à l’année.
Nos deux autres objectifs seraient de moderniser notre production et de trouver des fonds d’investissements pour de plus grandes serres, afin de produire plus longtemps. Cela nous permettrait d’être davantage autonome dans notre financement, et nous aiderait à développer le dispositif qui a beaucoup de retombées positives dans les quartiers. En effet, il y a véritablement un potentiel humain très important autour de notre projet. Environ 70 familles viennent régulièrement acheter nos légumes. Nous avons également noté un taux de 48% de sortie positive, et plus d’une centaine de personnes qui gravitent autour de nos activités, nos journées portes ouvertes, nos animations…
Par ailleurs, nous avons remarqué une hausse des demandes cette année. Le public recherche des chantiers d’insertion comme celui-ci, surtout depuis le premier confinement. Il y a également une hausse des jeunes gens qui ne trouvent pas d’insertion. Nous essayons de les intégrer au mieux pendant cette année particulièrement difficile.
Les structures d’insertion sont des dispositifs professionnalisant. L’idée est de travailler sur le parcours de la personne et de construire sa montée en compétences.